Kipul

Un jour, ou je parlais « limud » (etudes religieuses) avec un ami, ce dernier developpa sa theorie du « Kipul »!?

Kesaco?

Kipul, litteralement « le pli », du verbe « lekapel » qui signifie plier, est un concept global en terme d’education. On peut etendre le champ d’action au developpement personnel ou a toute autre activite qui vise a l’amelioration de l’individu…En effet, si vous comparer cela au premier pli qui vous passe par la tete, cela risque de vous paraitre derisoire et pourtant: si le pli de votre pantalon reste si radieux meme apres une position assise prolongee, c’est le resultat d’un savant repassage plus que d’une education du fer a repasser! Concernant l’enfant, il faut aussi « battre le fer tant qu’il est chaud ». C’est a dire, lui faire prendre de bonnes habitudes des son plus jeune age.

Developper les sens:

– Son ecoute tout d’abord.

En lui fredonnant: « Tora tziva lanu Moshe morasha kehilat Yaakov » des les premiers jours de sa vie afin que la torah le penetre et ne le quitte plus (certains afficionados preconisent la musique in utero pour adoucir les futures moeurs bien avant la naissance!). En l’habituant a ecouter le silence du desert, du vent qui fait bruisser les feuilles des arbres et le chant des oiseaux. La musique des instruments et celle de nos paroles. La melodie de la tefila et la purete du nigun. L’accent tonique du limud et la rethorique du mussar…

– Sa voix ensuite. Celles des mots de la priere dans sa bouche et des supplications des Tehilim (psaumes) dans sa gorge. Les chants du Shabbat et des jours de fetes. Les Selichot avant l’aube et le Shema dans son lit avant de se coucher. Les langues sacrees de l’etude et les langues etrangeres pour communiquer avec sa famille et ses amis d’hier, d’aujourd’hui et de demain…

– Sa vison encore et toujours.

Des lieux qu’il decouvre et de ceux qui lui sont familiers. Des visages et des images. Des natures mortes, de l’art en matiere ou des etres vivants en chair et en os. Aiguiser sans cesse sa curiosite et elargir son regard sur le monde en lui donnant de la perspective et de la hauteur. Le sensibiliser a la difference et a la multiplicite des creatures et a la grandeur et la toute puissance de son createur. aiguiser sa curiosite en poussant les portes des arrieres-cours des maisons et celles des musees et des expositions. Observer la nature et ses merveilles et tirer des enseignements de son environnement…

– Son toucher.

Lui apprendre les matieres et leur difference. La fraicheur du coton et la chaleur de la laine. La douceur de la soie et la rugosite du denim. L’autoriser et l’encourager a se servir ses mains pour installer et reparer, pour creer et modifier. Pour construire et parfois detruire pour mieux reconstruire. Palper pour mieux connaitre son corps et reconnaitre les zones douloureuses et celles qui delivrent les tensions…

– Son palais et son odorat.

En lui faisant decouvrir les gouts et les textures, les bouquets et les fragrances. Le doux et l’amer, le veloute et le croquant. Experimenter les melanges et les associations et fusionner les contraires. Oser l’aprete du vin et la force de l’alcool. Lutter contre le gras et les exces de sucre, de sel ou de tous les rehausseurs artificiels de gout. Rechercher le naturel et la fraicheur des aliments et fuir les ersatz frelates de la « malbouffe ».

– Habiter son corps dans son ensemble.

Par l’entremise du sport plaisir et de l’expression corporelle. Lui apprendre a marcher et a nager, a danser et a respirer. Et tout cela a son rythme et en faisant preceder l’envie et le plaisir a la technique et la competition. Respecter son corps par une hygiene externe (proprete) et interne (alimentation variee et equilibree) et celui des autres en appliquant le principe de Hillel: « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas que l’on te fasses »…

 Developper son individualite et sa communication:

– Developper les richesses de la relation a l’autre. Par une ecoute active, une empathie et une flexibilite adaptee aux demandes et aux besoins de l’autre. Lutter contre l’egoisme et l’egocentrisme en mettant en avant les qualites du don et de l’aide a son prochain. Poser les bases du cercle vertueux du dialogue et des attentions envers les autres…

– Provoquer la recherche de solution (« Si il ya a une solution, alors il y a un probleme! ») et l’improvisation. Apprendre a faire face a l’adversite en puisant dans ses ressources pour se depasser et surmonter l’epreuve. Rechercher la nouveaute et le challenge en mettant en place des nouveaux process pour des situations nouvelles. Autoriser l’individu a trouver ses propres solutions et encourager sa creativite afin de mettre au point (et modifier sans cesse) sa formule gagnante…

– Lui transmettre le gout de l’effort et la tenacite. Lui enseigner le chemin « long et court » (integration lente du process et capitalisation dans la duree, la pratique et l’experience) par opposition au chemin « court et long » (mise en avant de l’instantaneite et de la gratification immediate au detriment de la reflexion et de la perrenite)…

– Developper ses qualites intrinseques physiques et intelectuelles en mettant en exergue ses avantages et en corrigeant ses defauts ou handicaps afin de les minorer. Ne pas lui imposer de modele preconcu et previsible. En un mot lui donner l’envie de vivre et de se rejouir de sa vie en le laissant suivre son chemin.

Que de plis, que de plis! Je vous en supplie, n’en rajoutez-plis!

Nous sommes reconnaissants envers nos parents pour tous les bons kipulim (plis) qu’ils ont operes sur nos destinees et nous passons le reste de notre temps a defroisser les plisses, les bouillonnes et autres chiffones qu’ils ont commis en passant (et en repassant!).

 Alors pour revenir a plus de simplicite:

 Sachons raison garder et suivont notre instinct et notre bon sens. N’essayons pas d’appliquer a nos enfants exceptionnels des methodes et des recettes de masse. Privilegions le sur-mesure car la confection ne suffit pas toujours pour remplir les attentes et les besoins de nos cheres « tetes blondes » (brunes pour les miennes!). Les resultats ne sont pas dans nos mains et seuls les moyens nous sont requis pour faire la volonte de notre createur en restant des « shlichim neemanim » (des messagers fideles) a son service.

Prions avec ferveur et profitons de ce mois d’Elul ou « Le roi est dans les champs » afin de le solliciter pour que le kipul que nous essayons d’imprimer a nos enfants soit de bonne facture et de longue duree.